
S’il est bien un artiste qui a une relation avec l’architecture, c’est Christo, disparu le 31 mai à l’âge de 85 ans. Christo, sans oublier Jeanne-Claude avec qui il signera la plupart de ses projets, placés sous le signe de l’éphémère. Projets en effet, car tout est conçu puis mis en œuvre avec grande précision pour donner une puissance esthétique que seule une maîtrise technique peut assurer. Avant d’avoir recours au textile, l’artiste montera une barricade de bidons rue Visconti à Paris, bien avant 1968, car l’œuvre intitulée Iron Curtain, composée à partir de 89 barils de pétrole, dénonce à sa manière l’érection du mur de Berlin en 1961. Mais très vite, il sortira de cette rue étroite pour s’emparer de larges espaces et se confronter à de grands monuments. Si Running Fence, qui serpentera en 1976 sur 40 km dans une vallée de Californie, puis Surrounded Islands, 60 hectares de tissu couleur fuchsia déployés dans la baie de Biscayne à Miami en 1983 pour lutter contre les déchets, ont magnifiquement marqué le paysage américain par leur empreinte textile, le travail de l’artiste au cœur de capitales européennes a établi une nouvelle relation au patrimoine.
À la faveur d’un “empaquetage”, le pont Neuf à Paris avait ainsi gagné des reflets d’or, et le Reichstag à Berlin une nouvelle peau d’argent, avant que Norman Foster ne le transforme. Christo s’est également emparé de la question de l’espace public en créant des parcours inédits comme à New York avec The Gates, 37 km à Central Park en 2005, ou comme sur le lac d’Iseo en Italie, avec The Floating Piers, qui fut sa dernière œuvre en 2016.
Il proposera ainsi au public de marcher sur l’eau en suivant de grandes lignes taillées dans la toile orange. Avant le confinement, le Centre Pompidou s’apprêtait à ouvrir une exposition centrée sur l’œuvre parisienne et fondatrice de l’artiste, dont le nouveau projet était d’empaqueter cette fois l’Arc de Triomphe. L’exposition a été reprogrammée et l’événement reporté, lui, à 2021.
Exposition “Christo et Jeanne-Claude, Paris !”, jusqu’au 19 octobre, au Centre Pompidou.