Roland Castro, le remodeleur

Le 13 Juin 2023

Tribun, polémiste, urbaniste, Roland Castro, disparu le 9 mars dernier à l’âge de 82 ans, est une figure singulière de l’architecture. Son engagement politique l’a amené notamment à prendre position sur la ville et sa périphérie. En finir avec les banlieues était son cheval de bataille. Il animait avec Michel Cantal-Dupart l’association Banlieue 89 qui, deux ans après l’élection de François Mitterrand, a pris la forme d’une mission autour du Premier ministre Pierre Mauroy. En 2004, il créa le MUC, Mouvement d’utopie concrète, pour passer à l’action sur ces territoires périphériques. Mais son action ne se limitait pas à la banlieue parisienne. En réalisant la métamorphose exemplaire des barres parallèles sans qualité du Quai de Rohan à Lorient (1990-1996), Castro a ouvert la voie à la transformation des ensembles de logements sous la forme du “remodelage”. Travail qu’il a développé en d’autres lieux, à Villeneuve-la-Garenne (sur une barre de Jean Dubuisson arch.) comme à Vaulx-en-Velin ou à Oullins. “Remodeler, c’est arriver à mettre un peu de sensualité, un peu de plaisir dans des choses épouvantablement rigides, rigoureuses et absurdes”, expliquait-il.
Il figurait parmi les dix équipes invitées par Nicolas Sarkozy à participer à la consultation internationale du Grand Paris en 2008. Il proposa alors d’installer un opéra sur le port de Gennevilliers et d’ériger une ceinture habitée autour du parc de La Courneuve, à l’image de Central Park à New York. Avec Sophie Denissof, son associée depuis 1988 qui a partagé l’aventure urbaine, il a conçu, à Aubervilliers, la tour de logements Emblematik : un “village vertical” de 55 m de hauteur, livré en 2019, qui revisite le modèle de la tour en intégrant la nature dans les étages. Castro, qui se définissait comme un “Sisyphe heureux” (titre de son dernier livre) avait publié plusieurs ouvrages, dont Le Corbusier n’a pas rencontré Freud (Le Canoë, 2018).