“Vivre avec” Venise

Le 11 février 2025
Implantation et vue du pavillon français éphémère recevant la Biennale de 2025. Doc. Jakob + MacFarlane.

Paradoxe intéressant, le pavillon français fermé cette année pour travaux s’ouvre encore plus... Il y avait en effet un défi à assurer une présence française à la Biennale d’architecture de Venise pendant le chantier. Une consultation d’architectes a été lancée par l’Institut français pour trouver la meilleure adéquation à cette situation que d’autres nations ont connue par le passé. Est-ce le contexte particulier de vivre avec la contrainte qui a poussé les architectes lauréats (Jakob + MacFarlane, Éric Daniel-Lacombe et Martin Duplantier) à proposer “Living with” pour activer le lieu ? Toujours est-il qu’au vu de l’enjeu climatique et de la géopolitique, le positionnement du pavillon se montre particulièrement vif en réponse au thème “Intelligens” choisi par le commissaire général de cette Biennale, Carlo Ratti. Entièrement recyclable et conçu à partir d’échafaudages pour la structure et de caillebotis pour le plancher, le nouveau pavillon vient se coller au bâtiment existant pour faire corps avec lui et s’infiltre, sur l’arrière en descendant vers le canal, dans le bosquet qui le sépare du pavillon britannique. Dans cette démarche “zéro déchet”, le thème “Vivre avec” se décline selon six questions très contemporaines : l’existant, les proximités, les vulnérabilités, l’abîmé, la nature et le vivant, les intelligences réunies. Mais l’originalité cette année est d’avoir un pavillon français très ouvert sur le monde. Sur les cinquante projets présentés, une vingtaine provient de l’étranger, jusque du Bangladesh, où les architectes luttent contre la montée des eaux. Mayotte et la Guyane figurent parmi les territoires au rendez-vous vénitien. En plus de ces stratégies architecturales très situées répondant à l’urgence climatique et autres risques, les commissaires ont lancé un appel aux écoles d’architecture pour constituer un “atlas des aléas”. Parmi les sept qui ont activement répondu, on compte deux Ensa françaises (Paris-La Villette et Marseille) et deux écoles singulièrement concernées par le sujet de la vulnérabilité : la Kharkiv School of Architecture en Ukraine et le SCI-Arc à Los Angeles (avec qui Dominique Jakob et Brendan MacFarlane ont tissé des liens depuis longtemps). En offrant cette vision large, le pavillon français démontre la mobilisation des architectes pour penser le monde autrement. Pas de rêve, du concret. Démonstration faite par le projet construit.

Biennale d’architecture de Venise, “Intelligens. Natural. Artificial. Collective”, du 10 mai au 23 novembre 2025.