Gottfried Böhm, figure du brutalisme allemand

Le 15 Juillet 2021
L’église et la maison des pèlerins de Neviges, 1963-1973. Ph. © H.-J. Blißenbach / Stadt Velbert.

Il fait partie de ces architectes centenaires qui ont un œuvre solide. Un mois après Helmut Jahn (81 ans), auteur du Sony Center sur la Potsdamer Platz à Berlin, Gottfried Böhm s’est éteint chez lui, le 9 juin dernier, à l’âge de 101 ans. Il était le premier Allemand à recevoir, en 1986, le prix Pritzker, créé sept ans plutôt. Si le jury n’avait pas choisi une star de l’architecture, l’architecte étant peu connu en dehors de son pays, il avait consacré en tout cas un dessinateur de grand talent, dans le style expressionniste. Appartenant à une dynastie d’architectes et de constructeurs, Gottfried Böhm reprend l’agence de son père à Cologne, où il réalise sa première œuvre en 1950, la chapelle Madonna in den Trümmern ; chapelle qui sera intégrée, comme les ruines d’une église gothique, au musée Kolumba par Peter Zumthor en 2007. Auteur de nombreux bâtiments religieux, Gottfried Böhm signe son chef-d’œuvre à Velbert (entre Essen et Wuppertal, 1963-1973) sur le site du pèlerinage de Neviges, qui accueille des croyants depuis plusieurs siècles. L’ensemble a tout d’une montagne, dont les “falaises de béton”, comme diront les habitants, émergent du paysage : 7 500 m3 de béton et 510 tonnes d’acier pour l’armer. Son architecture brutaliste joue autant avec ses facettes qu’avec la topographie du lieu pour intégrer en épannelage l’ensemble des cellules du monastère ainsi que l’espace public rythmé par des marches.
Le travail de l’architecte dans le domaine du sacré s’étend jusqu’au Brésil où il réalise deux églises, dont celle de São Paulo Apóstolo à Blumenau (1963), manifestement inspirée par Notre-Dame du Raincy d’Auguste Perret. Gottfried Böhm a principalement réalisé des bâtiments publics, parmi lesquels l’hôtel de ville de Bensberg (1967), ouvrage de béton qui établit un lien fort avec le château médiéval voisin.
Et son travail sur une ruine à Bad Kreuznach (1976) confirme l’intérêt qu’il avait à aller au contact du patrimoine. L’Allemagne lui doit aussi le théâtre de Potsdam (2006) qui, abandonnant le brutalisme, renoue avec un certain expressionnisme.