Le renouveau d’une architecture-sculpture

Le 20 Avril 2021
La Tour aux figures, parc de l’île Saint-Germain, Issy-les-Moulineaux, Jean Dubuffet. Ph. © CD92 - Willy Labre, 2020

Plantée sur une butte du parc de l’île Saint-Germain, à Issy-les-Moulineaux, la Tour aux figures, 24 mètres de hauteur, a retrouvé tout son éclat. L’œuvre de Jean Dubuffet, érigée post-mortem en 1988, mais dont l’artiste avait pu approuver l’emplacement avant sa disparition, a fait l’objet d’une restauration menée par Pierre-Antoine Gatier. “J’essaye d’avoir un regard transversal pour me saisir de toute l’histoire du XXe siècle, y compris ces œuvres plastiques qui créent notre mémoire contemporaine”, dit l’architecte en chef des monuments historiques, missionné par le département des Hauts-de-Seine qui s’était vu céder l’œuvre par l’État en 2015 pour un euro symbolique.
L’enjeu de l’opération était d’opérer sur une architecture-sculpture dont il fallait d’abord soigner la matérialité, cette résine époxy avec sa peinture polyuréthane des années 1980. “Il s’agit d’une ‘repeinture’ par-dessus l’existant, comme à la Fondation Le Corbusier, pour y garder les couches archéologiques”, précise Pierre-Antoine Gatier. Pour cette remise en valeur, qui l’a amené à se plonger dans la problématique des techniques de peinture (ce ne sont pas des aplats), l’architecte a travaillé avec un plasticien, Richard Dhoedt, qui avait réalisé l’œuvre dont l’artiste avait conçu la maquette et les esquisses en 1967. Il fallait notamment bien respecter les raccords et traiter les joints entre les 90 plaques préfabriquées en atelier et montées sur place à l’origine. Dans une optique de transmission aux futurs restaurateurs, l’équipe s’est attachée à documenter le plus scrupuleusement possible cette matière picturale afin de constituer un cahier des charges, les couleurs se transformant inévitablement au fil du temps sous l’action du soleil.
Derrière la peau granulée et colorée se cachent une ossature métallique et un noyau en béton qui intègre l’escalier, le fameux “Gastrovolve”, espace labyrinthique ascensionnel de 117 mètres évoquant une grotte inédite, qui a été doté d’un nouvel éclairage. Ce travail de restauration s’est accompagné d’une mise en scène paysagère réalisée par l’équipe bordelaise Bouriette et Vaconsin dans l’idée de recréer des vues au fil du parcours.