N°101 - février 2011

Patrimoine, une mémoire partagée - La politique du patrimoine révèle l'esprit d'une société autant que ses nouvelles icônes architecturales.

Les merveilles du monde, naturelles ou construites, font déplacer les foules d'un bout à l'autre de la planète, sans doute parce que les voyagistes sont bons vendeurs, mais surtout parce qu'elles ont une valeur universelle qui s'inscrit dans la mémoire collective, à différentes échelles. En ce sens, on peut dire que le patrimoine crée du lien social, et parfois des brouilles. On le reçoit des générations précédentes et, sauf à le dilapider, on le transmet, enrichi, aux suivantes. Il partage cette problématique avec le développement durable, au moins au niveau philosophique. Les recyclages de bâtiments sont ainsi de plus en plus nombreux et divers. Après la reconversion des abattoirs de La Villette en Cité des sciences, ou celle d'une fonderie en université à Mulhouse1, les anciens Grands Moulins de Pantin sont devenus un siège de banque2, et des casernes ou des prisons désaffectées des campus ou des résidences universitaires (Reims, Lyon, etc.)...
Comme pour tout changement, ce n'est pas toujours facile, mais, quand l'intérêt public figure au programme, le solde est souvent positif. Aujourd'hui, l'avenir de l'hôtel de la Marine3, propriété de l'état place de la Concorde, monument classé, fait débat. Par souci d'économies, le gouvernement a lancé un appel d'offres de location des lieux, selon un bail emphythéotique et un programme à proposer. L'unique réponse à ce jour est une opération immobilière de luxe comportant commerces, galeries d'art contemporain, salles de ventes et quelques suites pour mécènes, des verrières coiffant les cours pour gagner des m2. Venues de tous horizons et de tous bords politiques, les nombreuses protestations montrent, non le refus du changement comme voudrait le faire croire le candidat à la reprise4, mais l'importance de la chose publique dans l'Hexagone. L'hôtel de la Marine, siège du ministère éponyme depuis la Révolution, est un élément majeur de la place de la Concorde, espace public sublime par sa dimension paysagère hors du commun, qui va de la Madeleine à la Chambre des députés, et des Tuileries aux Champs-Elysées, et où passent la Seine et le grand axe historique. Par son prestige et son histoire, elle est emblématique de l'état: place royale, réaménagée sous le second empire, lieu de fêtes républicaines dont le défilé du 14 juillet. On imagine difficilement pour l'hôtel de la marine un futur issu d'une proposition purement commerciale. Soucieux de calmer la polémique, le président de la République a annoncé, lors de la cérémonie des vœux au monde de la Culture5, la mise en place d'une commission indépendante pour déterminer la ‘meilleure utilisation' de ce monument. À suivre.
Gwenaël Querrien

1 - Cf. Archiscopie, n° 72, déc. 2007, § Actualité.
2 - Cf., dans ce numéro, § Actualité.
3 - Construit en 1774 par Jacques-Ange Gabriel, architecte de Louis XV.
4 - Alexandre Allard, qui a déjà acheté et transformé le Royal Monceau à l'issue d'un happening mondain d'un goût douteux, avant de le revendre à des fonds du Qatar.
5 - 18 janvier, cf. www.culture.gouv.fr Images des lieux sur a.c.o.ma.r.free.fr

 

 

Au sommaire

 

"Dakar, lycée français Jean-Mermoz", par François Lamarre
Lycée Jean-Mermoz, av. Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal. Programme : lycée français regroupant sections maternelle, élémentaire, collège et lycée, avec gymnase et plateau sportif, pour 2 400 élèves et une centaine d'enseignants, plus personnel administratif et agents d'entretien. Maîtrise d'ouvrage : AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger) / ministère des Affaires étrangères. Maîtrise d'ouvrage déléguée : lycée Jean-Mermoz. Maîtrise d'œœuvre : Terreneuve (Nelly Breton, Olivier Fraisse), architecte mandataire, avec Thomas Hus, chef de projet études et chantier et Alice Levy-Leblond, chef de projet, concours ; Adam Yedid, architecte associé à Paris. Paysagiste : Armelle Claude. Surfaces : 17 000 m2 SHON + 40 000 m2 d'espaces extérieurs sur une emprise de 6 ha. Coûts : 15,7 M€€ HT de travaux pour un investissement de 21 M€€ HT tout équipé. Calendrier : concours 2006, études 2006-2008, chantier bâtiments 2008-2010, chantier gymnase + plateau sportif 2010-2011, mise en service bâtiments rentrée 2010.

"Recyclage des Grands Moulins de Pantin", par Raphaël Labrunye
• Évelyne Lohr, Geneviève Michel, Nicolas Pierrot (dir.), Les Grands Moulins de Pantin, l'usine et la ville, Lyon, Lieux dits, 2009. 292 p., 35 €€.
• Les Grands Moulins de Pantin / BNP Paribas Securities Services, rue du Débarcadère, Pantin (Seine-Saint-Denis). Programme : restructuration et extension des Grands Moulins de Pantin pour créer un ensemble tertiaire (3 200 employés). Maîtrise d'ouvrage : SNC les Grands Moulins de Pantin / BNP Paribas Immobilier. Maîtrise d'œœuvre : Reichen et Robert (Bernard Reichen avec Jean-François Authier, D. Sipp, A. Thouret, M.-H. Maurette). Surface : 50 000 m2 SHON. Calendrier : début du chantier, 2006 ; livraison, sept. 2009. Coût : 115 M€€ HT.

"Draquila, l'Italie qui tremble", par Olivier Namias
Sabina Guzzanti, Draquila, l'Italie qui tremble, film documentaire, 93', Italie, 2010. Le film peut être téléchargé en langue originale sur le site internet www.draquila-ilfilm.it

"États généraux du Paysage", par Anne Demerlé-Got
"Paysage, fil conducteur du développement durable des territoires", séminaire organisé par le collectif des États généraux du paysage, et al. Paris, le 22 novembre 2010.

"Grand Prix de l'urbanisme", Anne Demerlé-Got
Sous la direction d'Ariella Masboungi, La ville est une figure libre, Laurent Théry, Grand Prix de l'urbanisme 2010, Marseille, Parenthèses, collection Grand Prix de l'urbanisme /MEEDDM, 2010, 128 p, 14 €€.

"Culture numérique et architecture : une introduction", par Enrico Chapel
Antoine Picon, Culture numérique et architecture : une introduction, Bâle, Birkhäuser, 2010, 217 p., 39,90 €€.

"Parcs et jardins du Rhône et de Lyon : deux nouveaux guides", par Gabriel Ehret
• Parcs, jardins et paysages du Rhône, Lyon, CAUE du Rhône, 2009 (rééd. 2010), 295 p., 22 €€.
• Pierrick Eberhard, Lyon et ses parcs et jardins, Lyon, Éditions lyonnaises d'art et d'histoire, 2010, 128 p., 15 €€.

"Tunis, l'Orient de la modernité", par Serge Santelli
Charles Bilas et Thomas Bilanges, Tunis, l'Orient de la modernité, Paris, Éditions de l'éclat, 2010, 319 p., 60 €.

€ "CCCP - Cosmic Communist Constructions Photographed", par Rémi Guinard
Frédéric Chaubin, CCCP - Cosmic Communist Constructions Photographed, Cologne, Taschen, 2011, 312 p., all./angl./fçs, 40 €€.

Mensuels parus