N°83 - février 2009

Éditorial et sommaire

Création et tradition - À propos d'architecture, on oppose souvent création et tradition (ou création et patrimoine), innovation et conformisme, ou plus généralement rupture et continuité.

Si ces oppositions peuvent avoir un sens en matière de communication, dans la production d'images ou de formules choc privilégiant l'instantanéité, elles n'en ont guère en architecture, celle-ci s'inscrivant dans le temps autant que dans l'espace. Sa nature est complexe et sa réalisation dépend d'acteurs multiples, puisqu'elle est à la fois art de construire - au sens le plus noble1, mais aussi dans ses dimensions économique et normative - et traduction spatiale des modes de vie d'une société. Le programme d'un édifice définit en effet son futur usage, même s'il est susceptible d'évoluer, tout comme la vie. Pratique artistique, l'architecture est aussi un métier technique, faisant appel à des connaissances pointues et à des savoir-faire multiples, comparable à la médecine ainsi qu'aimait à le rappeler l'architecte et théoricien Bernard Huet2. Or, on réduit souvent le talent de l'architecte contemporain à sa capacité à imaginer des formes originales, de l'architecture-sculpture attirant l'attention des foules et plus encore des médias. Grâce au logiciel Catia créé par Dassault Systèmes pour l'aéronautique en 1981, puis développé, entre autres, pour l'architecture, on peut calculer et visualiser en maquette 3D n'importe quelle forme, dont la construction est mise au point avec des bureaux d'études performants (cf. Bilbao). À la limite, on peut donc tout construire, si on dispose du budget requis. Mais dans le même temps, le constat scientifique des risques d'épuisement des ressources et de réchauffement de la planète a changé la donne. Optimiser les formes pour économiser l'énergie pourrait conduire à les simplifier à l'extrême afin de réduire les surfaces d'échanges thermiques, au risque de l'uniformité. Entre ces deux extrêmes, n'y a-t-il pas place, non pour un consensus mou, mais pour des projets intelligents qui prennent en compte dans chaque cas un ensemble d'objectifs - y compris poétique - et de données, dont une part est variable : ainsi, logiquement, on devrait arriver à une cohérence globale en s'inscrivant dans le développement durable et à une diversité des réalisations exprimant celle des talents et des situations. La tradition en architecture, c'est-à-dire cette continuité culturelle émergeant à partir d'expériences par essais et par erreurs menées au fil du temps - en quelque sorte le meilleur par décantation -, est à cet égard riche d'enseignements car ipso facto en relation étroite avec le milieu. La vitesse des transports, les échanges commerciaux et, plus largement, la mondialisation avaient un temps fait oublier que préserver le milieu sert aussi à préserver l'espèce.
Gwenaël Querrien

1 - Cf. Télérama (2/11/2008) : "Mon métier, c'est construire, c'est-à-dire fabriquer" dit Renzo Piano à Luc Chatelier dans une interview où il évoque aussi l'environnement.
2 - Il s'est notamment exprimé sur ce sujet à propos de la constitution des commissions chargées de la réforme des études Lmd (licence-master-doctorat).

 

 

Au sommaire

 

"Paris 7-Denis-Diderot : bâtiment Lamarck, pôle de biologie", par François Lamarre
5-7 rue Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé, Paris 13e. Maîtrise d'ouvrage : Département de Paris/Dir. des Affaires scolaires. Maîtrise d'ouvrage déléguée : Sémapa. Maîtrise d'œœuvre : Jean Guervilly, architecte mandataire, avec Françoise Mauffret, architecte associée. Bertrand Paulet paysagiste. Surfaces : 13 700 m2 Shon. Études : février-novembre 2005. Chantier : mai 2006-janvier 2008. Coût des travaux : 20,8 M€€.
NDLR : une mention spéciale à l'Équerre d'argent 2008 vient d'être décernée à ce bâtiment.

"Lille : Le Blan-Lafont, une citadelle prenable", par Bertrand Verfaillie
Réhabilitation des usines Le Blan-Lafont, 165 avenue de Bretagne, Lille (Nord) sur les rives de la Haute-Deûle. Maîtrise d'ouvrage : Lille Métropole communauté urbaine. Maîtrise d'ouvrage déléguée : SEM Soreli. Maîtrise d'œœuvre : cabinet Vincent Brossy (Paris). Coût global : 34 M€€.

"Reims : le lycée Franklin-Roosevelt restructuré", par François Lamarre
10 rue du Président Franklin Roosevelt, Reims (Marne). Maîtrise d'ouvrage : Région Champagne-Ardenne. Maîtrise d'œuvre : Agence Fouqueray-Jacquet, architecte mandataire. Surfaces : 39 000 m2, dont 6 000 m2 d'extensions neuves et 12 000 m2 de bâtiments existants réhabilités. Études : 2004-2006 ; appel d'offres : mars-juin 2006 ; travaux en 3 phases : 2006-2009. Coût des travaux : 14,2 M€€.

"Icomos : la relève est assurée", par Julien Bastoen
Premier Forum international des jeunes chercheurs et professionnels en patrimoine culturel et 16e assemblée générale du Conseil international des monuments et des sites (Icomos), septembre 2008, Québec.

"Siza. Une question de mesure", par Anne Demerlé-Got
Álvaro Siza. Une question de mesure. Entretiens avec Dominique Machabert et Laurent Beaudouin. Paris, éd. Le Moniteur, 2008, 280 p., 29 €€.

"L'esthétique de la rue en question", par Olivier Namias
• Gustave Kahn, L'Esthétique de la rue, introduction de Thierry Paquot, Gollion, éd. Infolio, coll. Archigraphy Poche, 2008, 214 p., 10 €€.
• Patrick Fournial, Retour à Rennes. Les mêmes lieux photographiés d'un siècle à l'autre, Paris, éd. Les Beaux Jours, 2008, 216 p., 19 €€.

"Formes urbaines de la ville-temple sud-indienne", par Serge Santelli
Jacques Gaucher, De la maison à la ville en pays tamoul, ou la diagonale interdite. Étude sur les formes urbaines de la ville-temple sud-indienne, Paris, éd. École française d'Extrême-Orient, coll. Mémoires archéologiques, n°23, 2007, 511 p., 68 €€.

"Le jardin et la maison arabes au Maroc", par Alain Borie
Jean Gallotti, Le Jardin et la maison arabes au Maroc, avec 160 dessins d'Albert Laprade et 136 planches en héliogravure d'après les photographies de Lucien Vogel [éd. Albert Lévy, 1926], Arles/Rabat, éd. Actes Sud/Centre Jacques-Berque, 2008, 389 p., 39 €€.

"L'espace et le temps en Camargue", par Gabriel Ehret
Bernard Picon, L'Espace et le temps en Camargue, 3e édition revue et augmentée, Arles, éd. Actes Sud, 2008, 301 p., 19,80 €€.

"Saenredam, peintre des églises au XVIIe siècle", par Pierre Pinon
Liesbeth M. Helmus et Gerdien Wuestman, Saenredam. La fachada occidental de la iglesia de Santa María de Utrecht, Madrid, éd. Museo Thyssen-Bornemisza, coll. Contextos de la Colección Permanente, n°22, 2008, 99 p. Ouvrage publié à l'occasion de l'exposition éponyme présentée du 11/11/2008 au 15/2/2009, cf. www.museothyssen.org.

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