N°132 - été 2014

Editorial et sommaire

Qu’est-ce qu’“intégrer une construction au tissu existant” ? - Le débat n’est pas nouveau et vient d’être relancé avec l’annulation, le 13 mai dernier par le tribunal administratif de Paris, du permis de construire concernant la démolition (partielle)-reconstruction du magasin 4 de la Samaritaine, au cœur du Paris historique.

L’ensemble du site, entre la Seine et la rue de Rivoli, a été racheté en 2001 par une filiale de LVMH, maître d’ouvrage du projet, et fait l’objet d’un programme global de rénovation1. Le caractère patrimonial des lieux leur a valu une attention particulière2 : une part des bâtiments est signée de Frantz Jourdain, une autre d’Henri Sauvage dont la célèbre façade sur Seine du magasin 2 (entièrement inscrit à l’inventaire) ; d’autres sont plus “ordinaires”, issues d’une histoire complexe3.
Le site a en effet été constitué entre 1883 et 1928 par rachats successifs d’immeubles et transformations multiples et de natures diverses ; certaines radicales, visant à créer des espaces fonctionnels et à donner aux magasins des façades prestigieuses à la hauteur de l’ambition commerciale de l’enseigne ; d’autres relevant d’une sorte de bricolage pour faire communiquer entre eux des immeubles auparavant disjoints. C’est le cas notamment du magasin 4, constitué au fil d’acquisitions qui n’iront jamais jusqu’à l’ensemble de l’îlot et qui, la crise de 1929 aidant, gardera pour façade sur la rue de Rivoli celles de trois immeubles mitoyens (jusqu’à leur récente démolition), auparavant propriété des établissements de fourrure Revillon ; des immeubles sans caractère monumental mais de bonne facture, s’inscrivant dans la continuité de la rue, tant par leur échelle que par leur écriture et leurs matériaux (murs, toitures, second œœuvre).
C’est cet ensemble que devrait remplacer le projet de l’agence d’architecture Sanaa avec son ondoyante façade de verre sérigraphié. Clairement, le maître d’ouvrage attendait des deux architectes japonais (prix Pritzker 2010 et signataires du Louvre-Lens) une nouvelle image forte, à l’instar des créations de Jourdain et de Sauvage en leur temps. Si le nouveau bâtiment respecte le gabarit et l’alignement, il fait rupture par ses matériaux, mais sans doute aussi par l’effet monospace de sa façade. L’argument (devenu rituel) du dialogue créé par le reflet de l’existant dans le verre a été avancé, ici comme ailleurs...
Pour l’heure, le tribunal a donné raison aux requérants4 pour non-respect de l’article UG.11.1.3 du PLU parisien qui dit que : “Les constructions nouvelles doivent s’intégrer au tissu existant, en prenant en compte les particularités morphologiques et typologiques des quartiers (rythmes verticaux, largeurs des parcelles en façade sur voies, reliefs...) ainsi que celles des façades existantes (rythmes, échelles, ornementations, matériaux, couleurs...) et des couvertures (toitures, terrasses, retraits...).” La question de l’interprétation de la loi est certes ouverte, mais aussi celle de la rédaction du PLU. LVMH et la Ville de Paris font appel. - à suivre5.
Gwenaël Querrien

1 - Commerces, hôtel de luxe côté Seine (Édouard François arch.), bureaux, 96 logements sociaux, crèche 60 berceaux. Cf. projet.samaritaine.com/fr/le-projet/.
2
- La DRAC veille et l’ACMH Jean-François Lagneau est associé au projet.
3 - Cf. deux études historiques réalisées pour LVMH, par le GRAHAL en 2003 (cf. note de synthèse), puis par l’historien Jean-François Cabestan en 2011 (cf.www.jeanfrancoiscabestan.com).
4 - Dont la SPPEF - Sté pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France -, présidée par Alexandre Gady qui défend l’idée que le patrimoine urbain n’est pas constitué des seuls monuments.
5 - Cf. aussi les réactions de l’Académie d’architecture et de l’UNSFA, § Brèves, p. 27.

 

 

Au sommaire


"Archives du Rhône à Lyon", par François Lamarre
Nouvelles archives départementales du Rhône, rue du Général Mouton-Duvernet, Lyon 3e. Maîtrise d’ouvrage : conseil général du Rhône. Maîtrise d’œœuvre : Gautier + Conquet architectes et paysagistes (mandataire), en association avec Dumetier Design et Séquences (Pirovano, Terlaud, Fleuriot architectes). Surface : 18 200 m2. Montant des travaux : 29,7 M€€ HT sur un total d’opération de 46 M€ TTC.

"Le musée Soulages, ou les leçons de Rodez", par Dominique Amouroux
Musée Soulages, jardin du Foirail, avenue Victor Hugo, Rodez (Aveyron). Programme : présentation des collections permanentes résultant des donations et prêts de Pierre et Colette Soulages (peintures, estampes, études des vitraux de Conques). Maîtrise d’ouvrage musée : communauté d’agglomération du Grand Rodez. Maîtrise d’œœuvre : RCR Arquitectes (Aranda, Pigem, Vilalta) et Gilles Trégouët, en collaboration avec Passelac et Roques (architectes associés au projet), Philippe Maffre (MAW, architecte-scénographe), M. Gines (Artec 3, concepteur lumière) et Yann Lodey (architecte, suivi du chantier). Surfaces Shon : musée, bibliothèque, salle de conférence, conservation et animation, réserves, 5 600 m2 ; salle d’expositions temporaires, 500 m2 ; Café Bras, 700 m2. Concours : 2008. Livraison : 2014. Coût de construction 15,73 € € HT (2 578 €/m2 Shon). Scénographie : 724 079 € HT. Maîtrise d’ouvrage Café Bras (118 couverts) : Michel et Sébastien Bras, Christophe Chaillou. Maîtrise d’œœuvre : RCR Arquitectes et Gilles Trégouët, en collaboration avec Artec 3 (concepteur lumière).

"Tour Euravenir à Lille", par François Lamarre Immeuble de bureaux et commerces, Zac du centre international d’affaires des gares, Euralille (Nord). Aménageur : Saem Euralille. Maîtrise d’ouvrage : Sogeprom, Projectim. Investisseur : groupe IRD (Institut régional de développement Nord - Pas-de-Calais). Maîtrise d’œœuvre : agence LAN (mandataire), Egis (maîtrise d’œœuvre d’exécution), Act Environnement (consultant HQE). Surface : 3 486 m2 Hon. Coût construction : 5,9 M€ HT.

"La rénovation du collège Karl-Marx à Villejuif", par Bénédicte Chaljub
Réhabilitation-extension du collège Karl-Marx, 49 avenue Karl Marx, Villejuif (Val-de-Marne). Maître d’ouvrage : conseil général du Val-de-Marne. Maîtrise d’œœuvre : Christiane Schmuckle-Mollard, architecte en chef des monuments historiques. Surfaces : restauration préexistant, 3 000 m2 ; extension, 600 m2 ; reconversion du gymnase en restaurant, 900 m2. Entreprise générale mandataire : Lefevre rénovation / Demathieu & Bard. Coût des travaux (avec le collège provisoire) : 19,73 M€ TTC. Calendrier : 2008-2011 (études) ; 2011-2013 (réalisation).

"Cinéma brésilien : la classe moyenne dans ses quartiers", par Rémi Guinard
Les Bruits de Recife (O som ao redor), de Kleber Mendonça Filho, Brésil, 2012, 131’, Survivance dist. Coffret DVD / Blu Ray disponible le 7/10/2014, Survivance production. Film, Vostf + bonus (3 courts métrages du réalisateur, commentaires audio, etc.), 25 €€.

"Udaipur, ateliers franco-indiens", par Serge Santelli

"Shanghai", par Jean-Pierre Le Dantec
Françoise Ged, Shanghai. L’ordinaire et l’exceptionnel, Paris, Buchet-Chastel, coll. Essais-Documents, 2014, 151 p., 16 €€.

"De l’industrialisation de la maison individuelle au “collectif horizontal”, par Guy Lambert
• Hélène Caroux (dir.), Réinventer la maison individuelle en 1945. La cité expérimentale de Noisy-le-Sec, Paris, Somogy éditions d’art, 2012, 168 p., 32 euros€.
• Anne Bossé, Marie-Laure Guennoc, Villagexpo, un collectif horizontal, Grâne, Créaphis, 2013, 151 p., 18 €.

"Architecture thérapeutique, Histoire des sanatoriums en France (1900-1945)", par Raphaël Labrunye
Philippe Grandvoinnet, Architecture thérapeutique. Histoire des sanatoriums en France (1900-1945), 2014, Genève, Métis Presses, coll. VuesDensemble, 2014, 347 p. 35 €€.

"De la case à la villa", par Serge Santelli
Epée Ellong et Diane Chehab, De la case à la villa, Paris, Riveneuve, 2014, 239 p., 25 €€.

"Cités invisibles. La naissance de l’urbanisme au Proche-Orient ancien", par Pierre Pinon
Jean-Claude Margueron, Cités invisibles. La naissance de l’urbanisme au Proche-Orient ancien. Approche archéologique, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 2013, 642 p. (près de 500 ill.), 88 €.

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